Nous résumons ici nos préoccupations et réflexions sur l’environnement financier des investisseurs particuliers à Luxembourg.

1.         Opportunités d’investissement pour les particuliers dans l’économie luxembourgeoise, ouverture des véhicules d’investissement étatiques: Nous constatons qu’une partie importante de l’épargne des ménages luxembourgeois est soit investie dans l’immobilier, soit sur des placements monétaires n’offrant qu’un faible rendement. Néanmoins, il nous semble y avoir un intérêt des luxembourgeois de participer également au financement de l’économie et des entreprises luxembourgeoises. D’un autre côté, les entreprises luxembourgeoises ont des besoins d’attirer des capitaux à long terme pour financer leurs investissements. Il s’agit dès lors de mener une réflexion de fond comment l’épargne des ménages peut être attirée vers l’économie nationale et comment assurer un ancrage luxembourgeois dans le capital des sociétés locales. La constitution de fonds ouverts au public pour financer des entreprises luxembourgeoises, l’ouverture au public du capital d’un « Future Fund » pour des investissements innovants ou d’un « fonds Juncker »  pour financer des projets d’infrastructure nous semblent des voies à explorer.

L’État étant propriétaire de nombreuses entreprises, il faudrait réfléchir pour regrouper certaines de ces entreprises publiques dans un fonds et ouvrir une part minoritaire du capital au public. La présence d’actionnaires privés pourrait renforcer la gouvernance d’un tel véhicule et introduire un focus plus grand sur un certain niveau de rentabilité à atteindre et une meilleure efficience dans les entreprises publiques.

A cet égard, nous déplorons la voie choisie pour reprendre les actions détenues par les partenaires allemands dans Enovos. A notre avis une introduction en bourse de Luxembourg aurait constitué une alternative intéressante, aussi au regard de la longue histoire (et succès) de la société prédécesseur, Cegedel, sur cette bourse.

2.         Éducation financière : nous voudrions souligner l’importance de l’éducation financière et la mise en place d’une stratégie nationale en la matière. De nombreux organismes internationaux, dont l’OCDE et la Commission européenne, recommandent aux États de mettre en place de telles stratégies et nous nous référons aux propositions du Comité pour la protection du consommateur financier (de septembre 2015) préparées sous la coordination de la CSSF.

Les principaux arguments pour développer une connaissance financière suffisante sont :

I.          La nécessité de pouvoir équilibrer un budget de dépenses personnelles ou de son ménage ;

II.        Être un consommateur/client averti lorsqu’il s’agit de contracter des prêts pour le financement d’une habitation et   des contrats d’assurances en tout genre ;

III.       Savoir constituer une épargne-retraite dès l’entrée dans la vie professionnelle et savoir gérer son épargne à long terme ;

IV.        Avoir des connaissances de base sur le financement d’une entreprise et les marchés financiers ;

V.       Au regard des nombreuses opportunités d’emploi offert par le secteur financier à Luxembourg, comprendre les différents métiers du monde bancaire et faire un meilleur choix, en connaissance de cause, dans sa voie éducative, universitaire et dans les premiers pas professionnels.

Par conséquent il nous semble primordial de mettre en place des programmes pour une éducation financière dans l’enseignement secondaire.

3.         Fiscalité de l’épargne : créer de nouveau un produit favorisant un investissement long terme en actions. Depuis l’abolition de la « loi Rau », le Luxembourg ne privilégie plus fiscalement l’investissement en actions. Depuis lors, les mesures fiscales mises en place semblent toutes favoriser l’épargne via des produits d’assurance. Or beaucoup de Luxembourgeois ont commencé à s’intéresser aux marchés financiers par le biais de la « loi Rau » et ont fait leurs premiers investissements dans des entreprises en raison de cette loi favorisant une déduction annuelle d’un investissement en actions luxembourgeoises à l’époque. Le fait de ne plus pouvoir favoriser  un investissement en actions locales sous la réglementation européenne n’enlève rien à l’utilité éducative d’une telle mesure.

Par ailleurs, nous observons que la France encourage l’investissement en actions européennes avec des mesures fiscales avantageuses comme le Plan d’Épargne en Actions. Plus récemment, ces mesures ont été renforcées par un Plan d’Épargne en PME. De même le Royaume-Uni a introduit des mesures similaires avec l’ « Individual Savings Account (ISA) » (voir le UK Finance Act 2013)

Nous proposons d’analyser ces mesures et de réintroduire dans le code fiscal lors de la réforme fiscale projetée une mesure pour favoriser l’investissement en actions d’entreprises européennes. Une mesure fiscale, même modeste, en faveur d’un investissement en actions serait un grand pas pour familiariser de nouveau les jeunes entrant dans la vie professionnelle avec le monde des investissements.

 4.         Imposition des revenus de capitaux, et en particulier des revenus de dividendes, pour les personnes physiques : Nous proposons de faciliter l’imposition des revenus de dividendes en prévoyant un système de retenue libératoire, similaire aux revenus d’intérêts. En effet, le système actuel de déclaration de ces revenus est beaucoup trop lourd et nous recevons régulièrement de nos  membres des suggestions pour faciliter ce système. Nous sommes également convaincus que les employés de l’administration fiscale passent un grand temps à vérifier ces déclarations sans que cela ne génère de grandes rentrées fiscales additionnelles. En toute neutralité fiscale, nous souhaiterions voir la mise en place pour les résidents fiscaux d’un système de retenue libératoire avec un taux à étudier et éventuellement un plafond de revenus de dividendes à mettre en place ; au choix du contribuable de demander le bénéfice de cette retenue libératoire ou de déclarer tous ces revenus comme auparavant pour pouvoir bénéficier des déductions et exonérations en place.

5.         Divers:

Transposition de la directive sur les mécanismes de restructuration des banques et fonds de garantie des dépôts bancaires: Nous souhaiterions que le public soit informé de manière adéquate sur ce sujet. INVESTAS organisera une conférence - débat sur la sécurité des dépôts bancaires.

Directives européennes sur « capital markets union » et « shareholder rights directive »: Nous voudrions souligner l’importance de ces directives pour tous les investisseurs particuliers dans l’Union Européenne ainsi que l’importance pour les entreprises, en particuliers les PME, pour avoir accès à des financements non bancaires via les marchés de capitaux. Notre organisation européenne, Better Finance, intervient régulièrement avec des propositions sur ces projets et centralise les points de vue des particuliers sur ces sujets. Un souci primordial est le rétablissement de la confiance des particuliers et ménages dans le système et intermédiaires financiers après la crise financière. Ceci passe nécessairement par une protection des intérêts de tous les investisseurs, une transparence exemplaire des produits financiers destinés au public retail et une réglementation et supervision harmonisées en Europe. Nous attirons l’attention sur ces sujets d’une grande importance pour tous les investisseurs dans l’Union Européenne.

 

Conclusions :

D’une manière générale, nous pensons qu’il est primordial de renforcer le niveau d’éducation financière, principalement chez les jeunes et en commençant dans l’enseignement secondaire, et de renforcer également une culture d’actionnariat au Luxembourg.

Pour constituer un capital – retraite, les particuliers et les ménages ont aujourd’hui le choix entre d’un côté des placements monétaires peu rémunérés et des produits d’assurance et de l’autre côté une participation active dans les marchés de capitaux via des produits de fonds et autres investissements. Cette dernière voie requière des mesures de protection de l’investisseur privé, des produits réglementés adaptés au particulier, des mesures fiscales favorisant un gain d’intérêt progressif aux marchés financiers. Les investisseurs privés luxembourgeois portent également un grand intérêt à l’économie et les entreprises nationales et sont ouverts à des véhicules permettant d’investir une partie de leur épargne dans le financement à long terme d’entreprises qu’ils connaissent très bien.

 

INVESTAS a.s.b.l.

INVESTAS a.s.b.l est l'association luxembourgeoise des investisseurs privés. Elle a pour but 1) de promouvoir l'épargne et d'encourager les investissements mobiliers en vue de favoriser entre autres les initiatives privées qui seraient à même d'augmenter la richesse économique du pays; 2) de défendre les intérêts des détenteurs de valeurs mobilières. INVESTAS a été créée en 1959. INVESTAS est membre de Better Finance (www.betterfinance.eu), la fédération européenne des investisseurs et usagers de services financiers.